Le gouvernement du Québec déposait il y a quelques semaines un projet de loi visant à favoriser la protection de la langue française dans la province. Le projet de loi 96 vise à moderniser le traitement du français dans diverses lois, dont (et principalement) dans la Charte de la langue française. Le but ici est d’affirmer que la seule langue officielle du Québec est le français, la «langue commune de la nation québécoise».
Chose intéressante côté P.I., la nouvelle mouture de la Charte fermerait la porte de sortie qui demeurait dans la Charte quant aux marques de commerce qui sont présentées dans une langue autre que le français. Depuis 1977, les entreprises conservaient en effet en principe le droit d’afficher toute marque dans une langue autre, les marques dépassant en quelque sortes ce que pouvait régir la loi québécoise, dont sa Charte. Ce faisant, les entreprises ont éventuellement compris le truc en utilisant des noms et des mots en anglais dans leurs marques affichées au Québec, au grand déplaisir de l’OQLF.
Visant visiblement à fermer cette porte aussi fort que le Québec le peut, le projet de loi 96 viendrait modifier la définition d’une marque de commerce dans la Charte, afin de préciser qu’on ne considérera dorénavant comme telle que les marques ENREGISTRÉES (déposée, selon le vocabulaire de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada). Ce faisant, toutes les marques présentées dans d’autres langues sans pour autant être enregistrées deviendront persona non grata au Québec, exposant les entreprises qui les utilisent à des sanctions éventuelles.
Si on met de côté le problème juridique de la compétence d’une province à imposer une telle restriction, les entreprises dont la marque est essentiellement tirée d’une langue autre que le français ont tout avantage à prendre les devants et à déposer leur marque de commerce. Heureusement, ce processus ne s’avère pas très coûteux ici, à comparer de nombreuses autres juridictions.
D’ailleurs, il semble aussi pertinent de préciser que le projet de loi 96 implique de plus une modification importante des règles en matière d’affichage et d’enseignes de magasins, par exemple. Dorénavant, en effet, le critère à appliquer pour juger de ce qui s’avère acceptable tablerait sur la présence « nettement prédominante » du français dans l’affichage en question. Cette modification s’avère susceptible de changer substantiellement la donne quant à ce qui s’avère permis au Québec, en matière d’affichage.
Le projet de loi 96 est actuellement à être débattu. Les dispositions concernant les marques de commerce, elles, entreraient en vigueur trois (3) ans après l’adoption éventuelle de la loi.