Doit-on permettre aux robots de circuler sur le trottoir? Le droit commence à s’interroger à savoir si ou comment cela pourrait fonctionner

On rapportait cette semaine que certains États américains sont déjà en train de modifier leurs lois afin de permettre aux robots de circuler sur les trottoirs.

Bien que la question puisse semble théorique pour l’instant, la réalité concerne des sociétés comme Amazon et FedEx, qui en sont déjà à tester des robots de livraison de colis en secteur résidentiel. Oui, on est déjà là! L’idée serait d’avoir un véhicule comme une camionnette qui arrive dans un quartier, puis y déploie de façon automatisée une flottille de robots qui iront du camion à la porte des résidences où les colis doivent être livrés. Des tests devraient être menés dans certaines villes, notamment en Californie, entre autres avec le robot Roxo de FedEx et le Scout d’Amazon.

En gros, le débat actuel à ce sujet rappelle celui des drones il y a quelques années. Cette fois, par contre, le débat ramène les choses au ras des pâquerettes (pour ainsi dire), en posant la question de savoir si on devrait modifier nos règles afin que des robots puissent rouler en ville sur les trottoirs. La question se posera aussi ici quant aux pistes cyclables, d’ailleurs.

Ce qu’il faut savoir à ce sujet, c’est que les robots de livraison existants ressemblent à une glacière ou à un petit frigo sur roues, selon le cas. Ces robots de centaines de kilos peuvent rouler à 10 ou 20 km/h. La question : leur présence est-elle compatible à celle des humains qui circulent sur les trottoirs? La question mérite d’être posée, et il faut se demander quelles règles devraient s’appliquer, au Québec, à ce sujet.

Certains États américains (dont la Pennsylvanie) ont déjà modifié leurs lois (comme leur code de la sécurité routière) afin d’autoriser la circulation des robots sur les trottoirs, sous réserve de certaines limites de poids et de vitesse. Devant de telles lois, certaines municipalités, comme Pittsburgh et San Francisco, se braquent et interdisent les robots sur leurs trottoirs.

Les tests en cours nous permettent déjà de voir poindre des problèmes, notamment en cas de confrontation entre un robot et un enfant ou une personne à mobilité réduite. Si le robot ne peut (ou veut) pas s’écarter, une personne en fauteuil roulant ou une personne âgée doit-elle, elle, s’écarter? Est-ce plutôt le robot qui devra toujours s’écarter? Une anecdote circule déjà (sans mauvais jeu de mots) sur une personne non voyante, en Californie, qui a été confrontée à un robot qui a refusé de lui céder le passage, avec le risque que cela impliquait pour la piétonne en question.

Chez nous, une urbaniste à laquelle j’en ai parlé trouvait aberrante l’idée de permettre à de tels robots de circuler dans les zones réservées aux piétons, mais ne pas avoir entendu parler d’un quelconque effort réglementaire ou législatif au Québec à ce sujet. Clairement, l’idée n’est pas encore sur notre radar.

Au Québec, le Code de la sécurité routière (le «C.S.R.») réserve généralement les trottoirs aux piétons, sous réserve de permettre aux cyclistes de les emprunter (de façon purement exceptionnelle), en interdisant évidemment généralement aux «véhicules routiers» de les emprunter. La loi comprend bien une définition de «véhicule autonome»  (c.-à-d. de niveau d’automatisation de conduite 3, 4 ou 5), avec une prohibition sauf pour le niveau 3 – bref en interdisant les véhicules purement robotiques, en tout cas dans nos rues et sur nos routes.

La question se posera donc, tôt ou tard, à savoir si et quand nous serons prêts à permettre aux robots de circuler seuls (sans conducteur ni pilote), que ce soit sur nos routes, nos trottoirs ou nos pistes cyclables. Comme les «vélorues», je ne serais pas surpris qu’au moment de modifier le C.S.R. on permette aux municipalités de permettre ou d’interdire la circulation des robots sur les trottoirs, avec des modalités et des amendes, etc.

Hmmm, vous êtes policier et constatez qu’un robot roule là il ne le doit pas; vous l’arrêtez? Vous lui collez un constat d’infraction après lui avoir couru après? Je ne suis pas sûr comment cela fonctionnera. En fait, il y a pas mal de choses dans les trames de faits liées à la circulation de robots en ville quant auxquelles on doit collectivement encore réfléchir.

Ah, les joies des défis perpétuels de la techno pour le droit!

Récemment, on peut d’ailleurs voir circuler à Montréal, un robot de messager qui suit un préposé afin de porter les boites pour lui. Eh oui, on en arrive déjà là!